Kabyles de la Chapelle et des quais de Javel
hommes de pays loin
cobayes des colonies
doux petits musiciens
soleils adolescents de la porte d'Italie
Boumians de la porte de Saint-Ouen
Apatrides d'Aubervilliers
brûleurs des grandes ordures de la ville de Paris
ébouillanteurs des bêtes trouvées mortes sur pied
au beau milieu des rues
Tunisiens de Grenelle
embauchés débauchés
manœuvres désœuvrés
Polaks du Marais du Temple des Rosiers
Cordonniers de Cordoue soutiers de Barcelone
pêcheurs des Baléares ou du cap Finistère
rescapés de Franco
et déportés de France et de Navarre
pour avoir défendu en souvenir de la vôtre
la liberté des autres
Esclaves noirs de Fréjus
tiraillés et parqués
au bord d'une petite mer
où peu vous vous baignez
Esclaves noirs de Fréjus
qui évoques chaque soir
dans les locaux disciplinaires
avec une vieille boite de cigares
et quelques bouts de fil de fer
tous les échos de vos villages
tous les oiseaux de vos forêts
et ne venez dans la capitale
que pour fêter au pas cadencé
la prise de la Bastille le quatorze juillet
Enfants du Sénégal
dépatriés expatriés et naturalisés
Enfants indochinois
jongleurs aux innocents couteaux
qui vendiez autrefois aux terrasses des cafés
de jolis dragons d'or faits de papier plié
Enfants trop tôt grandis et si vite en allés
qui dormez aujourd'hui de retour au pays
le visage dans la terre
et des hommes incendiaires labourant vos rizières
On vous a renvoyé
la monnaie de vos papiers dorés
on vous a retourné
vos petits couteaux dans le dos
Étranges étrangers
Vous êtes de la ville
vous êtes de sa vie
même si mal en vivez
même si vous en mourez .
25/03/2011
Char-Allégeance
Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n'est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus; qui au juste l'aima?
Il cherche son pareil dans le voeu des regards. L'espace qu'il parcourt est ma fidélité. Il dessine l'espoir et léger l'éconduit. Il est prépondérant sans qu'il y prenne part.
Je vis au fond de lui comme une épave heureuse. A son insu, ma solitude est son trésor. Dans le grand méridien où s'inscrit son essor, ma liberté le creuse.
Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n'est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus; qui au juste l'aima et l'éclaire de loin pour qu'il ne tombe pas?
Il cherche son pareil dans le voeu des regards. L'espace qu'il parcourt est ma fidélité. Il dessine l'espoir et léger l'éconduit. Il est prépondérant sans qu'il y prenne part.
Je vis au fond de lui comme une épave heureuse. A son insu, ma solitude est son trésor. Dans le grand méridien où s'inscrit son essor, ma liberté le creuse.
Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n'est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus; qui au juste l'aima et l'éclaire de loin pour qu'il ne tombe pas?
Forneret-Et si elle allait mourir
Mon Dieu ! si elle allait mourir !
Si la pelle allait la couvrir,
Avec son bec de bois qui ramasse la terre,
Si sa soeur ou son frère,
Pour la pleurer allaient venir !
Si la cloche toujours au guet
Allait donner sa voix qui fait :
Mort-mort, mort-mort, en hochant de la tête ;
Et que le fossoyeur fit fête,
Assis au bord de son creux fait !
Si la grande et jaune bougie
Allait flamber sur cette vie
Eteinte à tout jamais !
Si le drap noir sous sa croix blanche,
Etendant ses bras sur la planche,
Allait lui ôter l'air, si encore elle était !
Et si le prêtre aux chants de marbre
Allait se mettre à cheminer
Pour la conduire sous un arbre
Et puis comme tous la laisser !
Si des autres les os allaient tomber sur elle,
Dans sa maison construite sans truelle ;
Si pour la voir encor j'allais être obligé
De chercher dans ces os, son corps inanimé
Qui ne répondrait plus
A mes cris, à mes larmes ;
Qu'on toucherait dessous, dessus
Sans qu'il bougeât, - et que toutes les armes
Qui viendraient le fouiller n'y trouveraient que chair
Molle, et rendant un vent qui empoisonne l'air.
Si je ne reconnaissais pas sa bouche !
Si sa figure était farouche !
Si déjà ses traits étaient ravagés !
Si ses beaux yeux étaient rongés !
Si ses dents étaient serrées !
Sous ses lèvres crispées ;
Ses lèvres grimaçant, ses dents grinçant l'horreur !
Si sa poitrine était ouverte,
Et sa langue découverte,
Par son cou déchiré, pendant,
Et sa gorge saignant !
Je crois que j'aurais peur.
Peur ! eh ! de quoi peur ? d'une morte,
Qui dans sa fosse apporte
Un coeur à vous lorsqu'il battait,
Que vous seul il idolâtrait ?
Ce que vous avez eu pendant toute sa vie,
Ce qui l'a sans cesse nourrie,
Qui de son âme a fait un amour dans son corps,
Qu'elle a toujours gardé, sans craindre le remords ?
Peur d'une femme à qui vous diriez : Que tu meures ?
Je le veux, je le veux! Ne ris pas... tu l'effleures
Ce sein sur qui tu mets la pointe d'un poignard ;
Craindrais-tu la souffrance ?
" Allons, enfonce donc ! enfonce ! " - Et qu'un regard
Vous dit en se fermant : " Voilà mon existence. "
Des restes d'un tel corps pourrait-on avoir peur ?
Je m'y cramponnerais, ainsi qu'un ver rongeur.
De deux je ferais un ; j'aime tant, qu'il me semble
Que je lierais, chairs, os, entortillés ensemble ;
De sorte qu'on dirait en y fixant ses yeux
Jamais cet 1 de chair, n'a pu former un 2.
Si la pelle allait la couvrir,
Avec son bec de bois qui ramasse la terre,
Si sa soeur ou son frère,
Pour la pleurer allaient venir !
Si la cloche toujours au guet
Allait donner sa voix qui fait :
Mort-mort, mort-mort, en hochant de la tête ;
Et que le fossoyeur fit fête,
Assis au bord de son creux fait !
Si la grande et jaune bougie
Allait flamber sur cette vie
Eteinte à tout jamais !
Si le drap noir sous sa croix blanche,
Etendant ses bras sur la planche,
Allait lui ôter l'air, si encore elle était !
Et si le prêtre aux chants de marbre
Allait se mettre à cheminer
Pour la conduire sous un arbre
Et puis comme tous la laisser !
Si des autres les os allaient tomber sur elle,
Dans sa maison construite sans truelle ;
Si pour la voir encor j'allais être obligé
De chercher dans ces os, son corps inanimé
Qui ne répondrait plus
A mes cris, à mes larmes ;
Qu'on toucherait dessous, dessus
Sans qu'il bougeât, - et que toutes les armes
Qui viendraient le fouiller n'y trouveraient que chair
Molle, et rendant un vent qui empoisonne l'air.
Si je ne reconnaissais pas sa bouche !
Si sa figure était farouche !
Si déjà ses traits étaient ravagés !
Si ses beaux yeux étaient rongés !
Si ses dents étaient serrées !
Sous ses lèvres crispées ;
Ses lèvres grimaçant, ses dents grinçant l'horreur !
Si sa poitrine était ouverte,
Et sa langue découverte,
Par son cou déchiré, pendant,
Et sa gorge saignant !
Je crois que j'aurais peur.
Peur ! eh ! de quoi peur ? d'une morte,
Qui dans sa fosse apporte
Un coeur à vous lorsqu'il battait,
Que vous seul il idolâtrait ?
Ce que vous avez eu pendant toute sa vie,
Ce qui l'a sans cesse nourrie,
Qui de son âme a fait un amour dans son corps,
Qu'elle a toujours gardé, sans craindre le remords ?
Peur d'une femme à qui vous diriez : Que tu meures ?
Je le veux, je le veux! Ne ris pas... tu l'effleures
Ce sein sur qui tu mets la pointe d'un poignard ;
Craindrais-tu la souffrance ?
" Allons, enfonce donc ! enfonce ! " - Et qu'un regard
Vous dit en se fermant : " Voilà mon existence. "
Des restes d'un tel corps pourrait-on avoir peur ?
Je m'y cramponnerais, ainsi qu'un ver rongeur.
De deux je ferais un ; j'aime tant, qu'il me semble
Que je lierais, chairs, os, entortillés ensemble ;
De sorte qu'on dirait en y fixant ses yeux
Jamais cet 1 de chair, n'a pu former un 2.
Baczynski-Le mot est lourd
Le mot est LOURD
pourtant
plus léger que la lèvre
qui le pèse longuement
ainsi nous surchargeons l’air
en cherchant dans l’écho nos visages
Pourtant
ce monde est seulement
un monde à nous
la tornade des noms et des ombres identitaires
où
nous brûlons comme la lumière cheminante
chargée de nos futurs pas
Oh! Vie! Vie!
Eternelle inquiétude pour l'exactitude de nos pas !
(et non pas pour les noms de nos chemins)
même quand sonne la plénitude d’un chant trompeur
combien d'images
comme la pluie ruisselle sur nous ?
Calaferte-Vous avez laissé faire
Vous avez laissé faire un monde de corruption.
Vous avez laissé faire un monde de mensonge.
Vous avez laissé faire un monde de lâcheté.
Vous avez laissé faire un monde d’ignorance.
Vous avez laissé faire un monde de routine.
Vous avez laissé faire un monde de pauvreté.
Vous avez laissé faire un monde de souteneurs.
Vous avez laissé faire un monde d’équarrisseurs.
On arrête.
On emprisonne.
On torture.
On assassine.
Et maintenant – qu’est-ce que vous espérez ?
Non, je ne suis pas mort, mais que ça ne vous
empêche pas de m’envoyer des fleurs.
Supervielle-La demeure entourée
Le corps de la montagne hésite à ma fenêtre :
« Comment peut-on entrer si l’on est la montagne,
Si l’on est en hauteur, avec roches, cailloux,
Un morceau de la Terre, altéré par le Ciel ? »
Le feuillage des bois entoure ma maison :
« Les bois ont-ils leur mot à dire là-dedans ?
Notre monde branchu, notre monde feuillu
Que peut-il dans la chambre où siège ce lit blanc,
Près de ce chandelier qui brûle par le haut,
Et devant cette fleur qui trempe dans un verre ?
Que peut-il pour cet homme et son bras replié,
Cette main écrivant entre ces quatre murs ?
Prenons avis de nos racines délicates,
Il ne nous a pas vus, il cherche au fond de lui
Des arbres différents qui comprennent sa langue. »
Et la rivière dit : « Je ne veux rien savoir,
Je coule pour moi seule et j’ignore les hommes.
Je ne suis jamais là où l’on croit me trouver
Et vais me devançant, crainte de m’attarder.
Tant pis pour ces gens-là qui s’en vont sur leurs jambes.
Ils partent, et toujours reviennent sur leurs pas. »
Mais l’étoile se dit : « Je tremble au bout d’un fil.
Si nul ne pense à moi je cesse d’exister. »
Chereau-Penser plus loin que ses propres frontières
Je me sens profondément européen. Je suis européen. Peut-être ai-je même parfois touché du doigt un petit morceau de cette Europe ; je l'ai vue en y jouant des spectacles, d'Edimbourg à Belgrade ou Copenhague, en y distribuant mes films ou en les tournant, en Angleterre ou au Portugal.
Et j'ai vu, l'an dernier en avril à Varsovie, l'immense joie des Polonais à l'idée de réintégrer enfin la Communauté Européenne, une Europe qui n'était plus divisée, c'était bien une communauté culturelle qu'ils avaient le sentiment d'intégrer, ce jour-là. En rentrant à Paris, j'ai vu qu'il n'y avait aucune fête, chez nous, pour célébrer cet élargissement ni le retour au sein de l'Europe de ceux qui sortaient de cinquante ans de dictature. Ce jour-là, je me suis dit, comme aujourd'hui, en découvrant que la Grèce a ratifié le traité il y a trois semaines et que personne n'en parle, que nous étions peut-être, en France, des enfants gâtés.
Que nous ne voyions plus ce que nous avons dans les mains et que nous sommes pourtant en train de construire ; que nous pensions bien peu aux autres peuples d'Europe, pour qui il est si important de fabriquer cet ensemble inédit de pays qui se sont associés librement, qui veulent aller plus loin et faire mieux fonctionner cette construction européenne en lui donnant des règles et un sens.
Bien sûr, je comprends l'impression douloureuse, irréelle, que peut donner le fait de défendre un traité, à terme une Constitution, qui ne peut calmer aucun désespoir dans l'immédiat, mais qui sera un jour une règle commune qui bouleversera la donne pour les vingt, trente années à venir, jusqu'à la prochaine révision, c'est, déjà, la cinquième réécriture du traité de Rome, pour un meilleur fonctionnement et beaucoup plus de démocratie.
Une règle que les autres pays, d'autres continents, attendent de nous pour qu'en fonctionnant mieux nous les aidions à notre tour.
Ce traité ne peut pas être une réponse immédiate au chômage, à la douleur. Mais n'y a-t-il pas de la démagogie à s'appuyer sur le désespoir de ceux qui veulent des réponses immédiates ? Pourquoi demander à cette Constitution ce qu'on ne demande pas à la Constitution française ?
Démagogie de promettre que les solutions viendraient avec la victoire du non. Démagogie de laisser croire qu'une Constitution pourrait régler des problèmes particuliers quand la vocation de toute Constitution est de déterminer une forme de gouvernement et non son orientation politique. Démagogie de dire que le texte est dur à lire, ou trop compliqué : bien sûr qu'il est compliqué, on n'est pas en train de réécrire la Constitution américaine, on tente de mettre d'accord 25 Constitutions, 25 cultures, et autant de démocraties !
Nous ne construisons pas l'Europe pour défendre telle ou telle majorité politique dans notre pays, nous la voulons pour les majorités à venir, celles qui vont changer, par le biais de l'alternance dans chaque pays. Les règles que nous allons instituer avec ce traité ne peuvent être ni de droite ni de gauche : elles nous obligent à penser un peu plus loin que nos calculs politiques français, à regarder un peu plus loin que nos propres frontières. Un peu plus loin que le temps qu'il faut à un homme pour vivre. Est-ce qu'on pense que des guerres n'auront plus jamais lieu en Europe ?
A-t-on oublié qu'il y a soixante ans nous étions encore en guerre avec nos voisins ? Pense-t-on que cette paix que nous vivons est un acquis définitif, intangible ? N'a-t-on pas vu, en regardant l'ex-Yougoslavie, que tout pouvait recommencer ? Se souvient-on encore qu'avant 1945 l'Europe n'était qu'ambitions territoriales, déchirements et boucheries ?
Est-ce qu'on croit encore que la France est suffisamment forte, ou qu'elle rayonne assez, pour se débrouiller seule ? Pense-t-on que la diversité culturelle, pour ne prendre qu'un exemple, est mieux protégée si elle ne s'exerce que dans un seul pays, le nôtre, pour la simple raison qu'il serait le meilleur ? Est-on si heureux du traité de Nice qu'on ne veuille surtout pas le changer ? Croit-on que les 24 pays qui sont avec nous dans cette aventure n'attendent qu'un geste de notre part pour oser enfin réclamer la Constitution vraiment socialiste dont ils rêvent tous ? Exige-t-on de la Constitution française qu'elle nous garantisse éternellement une majorité de gauche ?
Dire oui, c'est donner à une utopie les moyens de devenir concrète, à un projet commun d'incarner l'avenir. C'est dire oui à ce qui est défini pour la première fois dans ce texte : la dignité humaine, la démocratie, l'égalité, le respect des droits de l'homme et des minorités, la tolérance, l'égalité entre les hommes et les femmes, l'égalité de salaire, entre autres, la justice, la solidarité. Et le refus des discriminations pour des raisons de race, d'origine, de religion ou d'orientation sexuelle, le droit à une protection contre le licenciement abusif, le droit de grève, le droit d'accès à une sécurité sociale, le droit à l'éducation gratuite, la reconnaissance et l'affirmation du rôle des services publics. Est-ce "rien" que tout cela ?
Va-t-on enfin arriver à faire confiance à l'avenir, aux êtres qui vivent et travaillent en Europe, comprendre que notre Vieux Continent est lancé dans une aventure toute neuve, cinquante ans, ce n'est rien, une invention politique, un espoir : 25 pays engagent l'avenir librement, consentant librement à des abandons de souveraineté. Peut-être est-ce ça, justement, qui dérange encore ?
N'y a-t-il pas, au fond, une profonde difficulté, difficulté très française, quand même, à se projeter dans l'avenir ? A se penser aujourd'hui comme partie d'un tout plus grand que nous, d'un projet qui va au-delà de nos frontières, au-delà de notre nostalgie nationale ? N'y a-t-il pas, dans tout cela, des relents de souverainisme ? Ce"non de gauche" ne vient-il pas aussi du fait qu'on croit toujours à la supériorité de la France, à notre capacité innée à gagner les autres pays à nos splendides idées de gauche sans même avoir besoin de convaincre, et qu'il nous suffirait de les énoncer pour que les peuples du monde les adoptent et s'avouent vaincus ?
"Contestataire" ou non, une fois dans l'urne, chaque voix comptera. Souvenons-nous du 21 avril 2002. Alors parlons crûment : le 29 mai, au nom du souverainisme, veut-on tuer ce rêve européen et voir à nouveau triompher Le Pen ?
(Penser plus loin que nos propres frontières – Patrice Chéreau – Le monde)
Baczynski-Tu es mon nom (Ty jesteś moje imię)
Tu es mon nom dans sa forme et sa raison
et le mien, si durablement virevoltant.
Je suis, avant que le siècle s’écoule sur un cheval - désœuvré,
orfèvre vert des oiseaux.
Tu es en moi un bouton d’or façonné de clarté de cirrus,
plus grande
que toute œuvre solitaire.
Je puise de tes inondations de sable des orages matinaux
qui ne s’éteignent pas,
chaque vie et chaque mort centuplées.
Tu es le marbre vivant, par lequel ma forme est arrivée,
la forme dans l’ouragan, visible à l’aube,
qui, sur les vitres laiteuses a éclaté en une flamme effilochée
et s’est figée dans la main comme moulée d’étoiles.
Tu es le nom de mes gestes et l’origine d’entente
qui comprend la musique et la logique,
la terre - sécheresse dans laquelle apparaît la sève - esprit
dans la tige de la voix------
Ty jesteś moje imię i w kształcie, i w przyczynie,i moje dłuto lotne.
Ja jestem, zanim minie wiek na koniu-bezczynie,
ptaków i chmur zielonych złotnik.
Ty jesteś we mnie jaskier w chmurze rzeźbiony
blaskiem
nad czyn samotny.
Ja z ciebie ulew piaskiem runo burz,
co nie gaśnie,
każdym życiem i śmiercią stokrotny.
Ty jesteś marmur żywy, przez który kształt mi przybył,
kształt w wichurze o świcie widziany,
który o mleczne szyby buchnął płomieniem grzywy
i zastygł w dłoni jak z gwiazdy odlany.
I jesteś mi imię ruchów i poczynaniem słuchu,
który pojmie muzykę i sposób,
który z lądu posuchy wzejdzie żywicą-duchem
w łodygę głosu.
Adler-Intérêt social-Extrait
Le sentiment d'infériorité gouverne la vie mentale; on peut clairement le reconnaître dans le sens de l'imperfection et de l'incomplétude, et dans la lutte ininterrompue à la fois des individus et de l'humanité.
Thomas Mann-La montagne magique-Extrait
« Mon Dieu, oui, la société est parfois un peu mêlée dans un tel établissement. On ne peut pas toujours choisir ses voisins de table, - ou cela vous mènerait-il ? A notre table, il y a aussi une dame de ce genre, Mme Stöhr, je crois que vous la connaissez, d’une ignorance meurtrière, il faut l’avouer, et quelquefois on ne sait pas trop où regarder lorsqu’elle bavarde. Et en même temps, elle se plaint de sa température et de se sentir si fatiguée, et il semble que ce ne soit pas du tout un cas si bénin. C’est si bizarre – sotte et malade – je ne sais pas si je m’exprime exactement, mais cela me semble tout à fait singulier lorsque quelqu’un est bête et de plus malade, lorsque ces deux choses sont réunies, c’est bien ce qu’il y a de plus attristant au monde. On ne sait absolument pas quelle tête on doit faire, car à un malade on voudrait témoigner du respect et du sérieux, n’est-ce pas ? La maladie est en quelque sorte une chose respectable, si je puis ainsi dire. Mais lorsque la bêtise s’en mêle, avec des « formulus » et des « institus cosmiques » et des bévues de cette taille, on ne sait vraiment plus si l’on doit rire ou pleurer, c’est un dilemme pour le sentiment humain, et plus lamentable que je ne saurais dire. J’entends que cela ne rime pas ensemble, cela ne s’accorde pas, on n’a pas l’habitude de se représenter cela réuni. On pense qu’un homme doit être bien portant d’ordinaire, et que la maladie doit rendre l’homme fin et intelligent et personnel. C’est ainsi que l’on se représente d’habitude les choses. N’est-ce pas votre avis ? J’avance peut-être plus que je ne pourrais justifier, conclut-il. Ce n’est que parce que cela m’est venu par hasard… » Et il se troubla.
Joachim, lui aussi, était un peu embarrassé et Settembrini se tut, les sourcils levés, en faisant semblant d’attendre par politesse que son interlocuteur eût terminé. En réalité, il attendait que Hans Castorp se fût complètement troublé avant de répondre :
« Sapristi, mon cher ingénieur, vous déployez là des dons philosophiques que je ne vous aurais jamais prêtés. D’après votre théorie il faudrait que vous soyez moins bien portant que vous ne vous en donnez l’air, car il est évident que vous avez de l’esprit. Mais permettez-moi de vous faire remarquer que je ne puis pas suivre vos déductions, que je les récuse, oui, que je m’y oppose avec une hostilité véritable. Je suis, tel que vous me voyez ici, un peu intolérant en ce qui touche les choses de l’esprit, et j’aime mieux me faire traiter de pédant que de ne pas combattre des opinions qui me semblent aussi répréhensibles que celles que vous venez de développer devant nous…
- Mais, monsieur Settembrini…
- Permettez… Je sais ce que vous voulez dire. Vous voulez dire que vous n’avez pas pensé cela très sérieusement, que les opinions que vous venez d’exprimer ne sont pas précisément les vôtres, mais que vous n’avez en quelque sorte que saisi au passage une des opinions possibles et qui flottaient pour ainsi dire dans l’atmosphère, pour vous y essayer une fois, sans engager votre responsabilité propre. Ceci répond à votre âge, qui manque encore de résolution virile et se plaît à faire provisoirement des essais avec toute sorte de points de vue. « Placet experiri », dit-il en prononçant le c de placet à l’italienne. Un excellent principe. Ce qui me rend perplexe, c’est tout au plus le fait que votre expérience s’oriente justement dans une certaine direction. Je doute que le hasard y soit pour beaucoup. Je crains qu’il n’existe chez vous un penchant qui menacerait de devenir un trait de caractère s’il n’était pas combattu. C’est pourquoi je me sens obligé de vous reprendre. Vous m’avez dit que la maladie, jointe à la bêtise, était la chose la plus attristante qui soit au monde. Je puis vous accorder cela. Moi aussi je préfère un malade spirituel à un imbécile phtisique. Mais ma protestation s’élève dès l’instant où vous commencez à considérer la maladie au même titre en quelque sorte que la bêtise, comme une faute de style, comme une erreur de goût de la Nature et comme un « dilemme pour le sentiment humain » ainsi qu’il vous a plu de vous exprimer. Et lorsque vous paraissez tenir la maladie unie à la bêtise pour quelque chose de si noble et – comment disiez-vous donc ? – de si digne de respect qu’elle ne s’accorde pas le moins du monde avec la bêtise. Telle était, je crois, l’expression dont vous vous êtes servi. Eh bien, non ! La maladie n’est aucunement noble, ni digne de respect, cette conception est elle-même morbide, ou ne peut que conduire à la maladie. Peut-être éveillerai-je le plus sûrement votre horreur contre elle, en vous disant qu’elle est vieille et laide. Elle remonte à des temps accablés de superstitions où l’idée de l’humain était dégénérée et privée de toute dignité, à des termes angoissés auxquels l’harmonie et le bien-être paraissaient suspects et diaboliques, tandis que l’infirmité équivalait à une lettre de franchise pour le ciel. Mais la raison et le Siècle des Lumières ont dissipé ces ombres qui pesaient sur l’âme de l’humanité – pas complètement : la lutte dure aujourd’hui encore. Et cette lutte, cher Monsieur, s’appelle le travail, le travail terrestre, le travail pour la terre, pour l’honneur et les intérêts de l’humanité, et, chaque jour retrempées par cette lutte, ces forces finiront par affranchir définitivement l’homme et par le conduire sur les chemins de la civilisation et du progrès, vers une lumière de plus en plus claire, de plus en plus douce et de plus en plus pure »
« Nom de Dieu, pensa Hans Castorp, stupéfait et confus, on dirait un air d’opéra ! Par quoi ai-je provoqué cela ? Cela me semble un peu sec d’ailleurs. Et que veut-il donc toujours avec le travail ? D’autant que cela me semble bien déplacé, ici. » Et il dit :
« Très bien, monsieur Settembrini. Vous dites cela admirablement… On ne pourrait pas du tout l’exprimer plus… d’une manière plus plastique, veux-je dire…
- Une rechute, reprit Settembrini, en levant son parapluie au-dessus de la tête d’un passant, une rechute intellectuelle dans les conceptions de ces temps obscurs et tourmentés, - croyez-m’en, ingénieur, - c’est de la maladie, c’est une maladie explorée à satiété, pour laquelle la science possède plusieurs noms, l’un qui ressortit à la langue de l’esthétique et de la psychologie, et l’autre qui relève de la politique, - ce sont des termes d’école qui n’ont rien à voir ici et dont vous pouvez parfaitement vous passer. Mais comme tout se tient dans la vie de l’esprit, et qu’une chose découle de l’autre, que l’on ne peut pas abandonner au diable le petit doigt sans qu’il vous prenne toute la main et tout l’homme par surcroît… comme, d’autre part, un principe sain ne peut jamais produire que des effets sains, quel que soit celui que l’on pose à l’origine, - souvenez-vous donc que la maladie, loin d’être quelque chose de noble, de par trop digne de respect pour pouvoir être sans trop de mal associée à la bêtise, - signifie bien plutôt un abaissement de l’homme, oui, un abaissement douloureux et qui fait injure à l’Idée, une humiliation que l’on pourrait à la rigueur épargner et tolérer dans certains cas particuliers, mais que l’honorer sous l’angle de l’esprit – rappelez-vous cela ! – signifierait un égarement, et le commencement de tout égarement spirituel. Cette femme à qui vous avez fait allusion – je renonce à me rappeler son nom, - Mme Stöhr donc, je vous remercie, - bref cette femme ridicule – ce n’est pas son cas, me semble-t-il, qui place le sentiment humain, comme vous le disiez, devant un dilemme. Elle est malade et bête, - mon Dieu, c’est la misère en personne, la chose est simple, il ne reste qu’à avoir pitié d’elle et à hausser les épaules. Mais le dilemme, monsieur, le tragique commence là où la nature fut assez cruelle pour rompre – ou empêcher dès le début – l’harmonie de la personnalité, en associant une âme noble et disposée à vivre à un corps inapte à la vie. Connaissez-vous Léopardi, ingénieur, ou vous, lieutenant ? Un poète malheureux de mon pays, un homme bossu et maladif, une âme primitivement grande, mais constamment abaissée par la misère de son corps, et entraînée dans les bas-fonds de l’ironie, mais dont les plaintes déchirent le cœur. Ecoutez ceci ! »
Et Settembrini commença de déclamer en italien, en laissant fondre sur sa langue les belles syllabes, en tournant la tête d’un côté ou de l’autre et en fermant parfois les yeux, sans se soucier de ce que ses compagnons ne comprenaient pas un traître mot. Visiblement il s’efforçait de jouir lui-même de sa mémoire et de sa prononciation, tout en les mettant en valeur devant ses auditeurs. Enfin il dit :
« Mais vous ne comprenez pas, vous écoutez sans percevoir le sens douloureux de cela. L’infirme Léopardi, messieurs, pénétrez-vous-en bien, a été surtout privé de l’amour des femmes, et c’est cela qui l’a empêché d’obvier au dépérissement de son âme. L’éclat de la gloire et de la vertu pâlissait à ses yeux, la nature lui semblait méchante – d’ailleurs elle est mauvaise, bête et méchante, sur ce point je lui donne raison – et il désespéra, c’est terrible à dire, il désespéra de la science et du progrès. C’est ici que vous entrez dans la tragédie, ingénieur. C’est ici que vous avez votre « dilemme de l’âme humaine », mais non pas chez cette femme-là, je renonce à encombrer ma mémoire de ce nom… Ne me parlez pas de la « spiritualisation » qui peut résulter de la maladie, pour l’amour de Dieu, ne faites pas cela ! Une âme sans corps est aussi inhumaine et atroce qu’un corps sans âme, et, d’ailleurs, la première est l’exception rare et le second est la règle. En règle générale, c’est le corps qui prend le dessus, qui accapare toute la vie, toute l’importance et s’émancipe de la façon la plus répugnante. Un homme qui vit en malade n’est que corps, c’est là ce qu’il y a d’antihumain et d’humiliant, - dans la plupart des cas il ne vaut guère mieux qu’un cadavre… »
Pologne-Katyn
1939, 18 septembre :
Communiqué à la radio soviétique : "La Pologne était devenue une tête de pont commode pour toutes sortes d'éventualités difficiles à prévoir et susceptibles de présenter une menace pour l'URSS. (...) Dans ces conditions, le gouvernement soviétique a donné l'ordre au haut commandement de l'Armée Rouge de faire franchir la frontière au troupes et de prendre sous leur protection la vie et les biens de la population".
Article de la Pravda : l'invasion soviétique de la Pologne était destinée à "sortir le peuple polonais d'une guerre malencontreuse où l'a plongé l'attitude déraisonnable de ses dirigeants, et lui donner la possibilité de mener à nouveau une vie paisible".
1939, 19 septembre :
Communiqué commun germano-soviétique : "Les soldats allemands et soviétiques ont pour mission de restaurer la paix et l'ordre troublés par le désintégration de l'Etat polonais et d'aider la population polonaise à réorganiser les bases de son existence politique."
1940, mars et avril :
Exécution à Katyn, près de Smolensk, de 4 143 officiers polonais, 4 403 à Kharkov ; 10 000 autres sont portés disparus.
Katyn : archives d'un massacre
Il y a soixante ans, près de 25 000 prisonniers de guerre polonais étaient massacrés par les forces soviétiques sur ordre de Staline. A la découverte du charnier de Katyn, longtemps attribué aux nazis par la propagande soviétique, s'est adjointe celle de dizaines de nouvelles fosses. Des éléments accablants pour le régime communiste.
Le massacre de milliers d'officiers polonais à Katyn (dans l'actuelle Russie, à l'ouest de Smolensk), au printemps 1940, fut longtemps présenté par la propagande communiste comme un forfait "perpétré par les nazis".
Révélé en 1943 par les Allemands qui occupaient la région depuis 1941, il a toujours été nié, contre toute évidence, par l'URSS. Dès 1959 pourtant, le KGB avait remis à Nikita Khrouchtchev des détails chiffrés sur le crime soviétique de Katyn. Au Kremlin on estimait cependant qu'il était inutile de révéler la vérité, car l'Occident s'était “habitué à la version de la culpabilité allemande”.
Trente ans plus tard, en 1990, Mikhaïl Gorbatchev, secrétaire général du Parti communiste d'Union soviétique, livra une partie, toujours édulcorée, mais plus précise, des archives concernant Katyn à son homologue polonais, Wojciech Jaruzelski. Ce n'est toutefois qu'en 1992, alors que l'URSS n'existait plus, que le président russe Boris Eltsine offrit au président polonais Lech Walesa le document contenant l'ordre que Staline avait donné au NKVD (la police politique) d'exterminer 25 700 combattants polonais prisonniers.
Aujourd'hui, l'ouverture des archives, les exhumations d'autres charniers permettent d'apporter d'utiles précisions sur ce drame.
Tout commença avec l'invasion de la Pologne par l'Armée rouge le 17 septembre 1939, conformément aux protocoles secrets du pacte germano-soviétique du 23 août et du 28 septembre 1939 qui prévoyaient le partage de la Pologne entre l'Allemagne et l'URSS. Soldats, officiers et civils polonais furent alors massivement arrêtés par le NKVD : 150 000 militaires furent retenus prisonniers dans les camps de Starobielsk, Kozielsk et Ostachkov, ainsi que dans les prisons d'Ukraine et de Biélorussie occidentales.
Face aux ordres de "désengorger" les camps, Lavrenti Beria, le chef du NKVD, proposa, dans une lettre " strictement confidentielle " adressée à Staline et datée de mars 1940, l'extermination massive des prisonniers de guerre polonais. Sur quatre feuillets dactylographiés, il énumérait les "ennemis jurés du pouvoir soviétique" polonais détenus par le NKVD qui "méritaient la peine capitale - par fusillade". Cette proposition fut signée et approuvée par Staline, Vorochilov, Molotov, Mikoyan, Kalinine et Kaganovitch, membres du Politburo - l'organe suprême du parti communiste.
C'est donc à la suite du rapport de Beria que Staline, par la "décision du 5 mars 1940", ordonna la liquidation de 25700 Polonais, "ennemis incorrigibles" qui "attendaient seulement d'être libérés pour participer activement à la lutte contre le pouvoir soviétique" - à l'époque, un pouvoir soviétique allié au pouvoir nazi. Cette décision donnait une apparence de légalité à la perpétration d'actes arbitraires et criminels commis à l'encontre de citoyens qui luttaient contre l'agression et l'occupation de leur pays par l'URSS.
Le NKVD avait noté les adresses des familles des prisonniers qui avaient pu maintenir le contact avec leurs proches. Ces familles furent inscrites dans les registres des Polonais destinés à la grande déportation d'avril 1940 vers la Sibérie et le Kazakhstan, ainsi qu'aux suivantes, notamment celles de juin et juillet 1940, qui, en s'ajoutant à celle de février, touchèrent près de 1 800 000 personnes dont peu survécurent.
C'est en mars-avril 1940 qu'une commission spéciale examina, conformément à la décision du Politburo, le cas de tous les prisonniers polonais. "Au fur et à mesure que les autorisations de liquidation arrivaient, témoigne Iouri Zoria, lieutenant-colonel du GRU (les renseignements militaires soviétiques), Soprounienko [directeur aux Affaires des prisonniers de guerre du NKVD] formait des groupes de 100-150 prisonniers qui étaient confiés, selon les ordres des directeurs des camps, aux commandants des régions du NKVD de Smolensk, de Kharkov et de Kalinine."
Toute l'opération était dirigée par Merkoulov, l'un des adjoints de Beria. La planification du transport par voie ferrée fut confiée au responsable de la direction supérieure des transports du NKVD, Milstein. L'organisation de la sécurité le long du trajet, quant à elle, incomba au commandant des soldats du train du NKVD, le général-major Charapov. L'expédition des Polonais hors des camps ressortit de la responsabilité directe de Soprounienko et de son adjoint Khokhlov.
Transférés à Smolensk, à Kharkov (aujourd'hui Kharkiv, en Ukraine) et à Kalinine (aujourd'hui Tver, en Russie), les militaires polonais furent, des nuits durant, torturés. Les cadavres des détenus de Smolensk étaient ensuite chargés dans des camions qui, de nuit, les transportaient au bois de Katyn, où se retrouvaient, à l'époque même du crime, pour pécher dans le Dniepr, les dirigeants soviétiques, notamment Kaganovitch, membre du Politburo, - qui n'ignorait rien de ce qui s'y passait.
De Kharkov, les corps des victimes étaient expédiés à Dergatché, au sixième quartier du parc forestier, aujourd'hui municipal, qui abritait à l'époque les résidences du maréchal Vorochilov, de Khrouchtchev, de Kaganovitch et d'autres membres de la nomenklatura, ce qui rendit difficile, en 1991 encore, l'approche de ce cimetière politique polonais et ukrainien. De la prison de Kalinine, les cadavres des officiers polonais étaient transférés au charnier de Miednoyé pour lequel, se souvient l'un des membres du NKVD, "Moscou avait livré une pelleteuse mécanique".
Une partie des prisonniers furent mis à mort à l'emplacement même des fosses. Après leur acheminement à Smolensk, en gare de Gniezdovo, des militaires polonais du camp de Kozielsk furent emmenés au bois de Katyn, où ils furent abattus au bord et à l'intérieur des fosses communes. Des prisonniers descendus à la station de Dergatché furent obligés de parcourir à pied huit kilomètres jusqu'au parc forestier, où ils durent probablement creuser leurs propres tombes.
Le déroulement du massacre de Katyn a pu être reconstitué par des commissions d'enquête constituées dès 1943, par la résistance polonaise, par la commission du Congrès des États-Unis, par des témoins et des historiens qui ne se sont pas laissé intimider par les interdits soviétiques. Cependant, il fallut attendre 1991, puis 1995, pour que des équipes polonaises puissent travailler sur les charniers de Dergatché et de Miednoyé.
A Dergatché, les bourreaux tuaient les prisonniers d'une balle dans la nuque ; lorsqu'ils rataient leur tir, ils achevaient les victimes à coup de baïonnette, de crosse ou de hache. Dans 136 cas sur 3 891, la balle a été tirée dans le cou, vers le haut, de façon à broyer le visage. Les officiers abattus avaient en général une trentaine d'années, mais il y avait parmi eux des hommes âgés et des jeunes gens de moins de vingt ans. On a découvert en 1991 à Dergatché 14 fosses de gradés polonais, situées à côté de 60 fosses de civils ukrainiens liquidés là par la police politique (la Tcheka, le Guépéou puis le NKVD) depuis les années 1920.
Il existe désormais des heures de documentation filmée depuis 1991-1992 sur les lieux des exhumations, depuis près de Kalinine et Kharkov, à Dergatché, à Piatikhatki, à Miednoyé, ou à Irkoutsk, où se trouvent trois fosses de Polonais sous la datcha de l'ex-NKVD, tout près de l'aéroport international. Nous disposons en outre du témoignage de membres du NKVD interrogés lors de récentes enquêtes : "Ce sont les nôtres qui ont fusillé les Polonais en 1940. Et aussi, une partie des religieux polonais qui ont été abattus dans les caves du NKVD à Smolensk (il s'agit des aumôniers, catholique, protestant, orthodoxe, ainsi que le rabbin de l'armée polonaise conduits dans des camps à la veille de Noël 1939)", déclare un fonctionnaire du NKVD de Smolensk, Klimov.
Tokariev, chef du NKVD de Kalinine à l'époque, raconte, avec une conclusion extraordinaire : "Quand les Moscovites ont fini le massacre, ils ont fait un banquet, mais je n'y suis pas allé. [...] On tuait tous les jours, même le 1er mai. [...] 250 hommes par jour, tout un mois. Même le 1er mai"
Finalement, sur les 230 000 prisonniers de guerre polonais, officiers ou simples soldats, officiellement déclarés par Staline à l'issue des combats de septembre 1939, on peut affirmer aujourd'hui que 4404 officiers détenus à Kozielsk ont été assassinés à Katyn, 6287 officiers d'Ostachkov ont été massacrés près de Kalinine, à Bologoyé et Piatikhatki, 3891 officiers prisonniers à Starobielsk ont été retrouvés morts près de Kharkov à Dergatché, au Lesopark (le parc forestier), 3435 ont été tués dans les prisons d'Ukraine, 3970 dans les prisons biélorusses, enfin, 2595, ou plus, ont été exécutés sur place ou emmenés et achevés par le NKVD après l'attaque allemande contre l'URSS, le 21 juin 1941.
Si l'on ajoute à ces chiffres un millier de combattants et de résistants civils ou militaires antinazis traqués et assassinés par les Soviétiques, on obtient un total de 25700 victimes, celui que souhaitait Staline. 42000 prisonniers ont été donnés aux Allemands ou libérés, 75000 ont rejoint les Forces polonaises d'Occident et 7000 l'Armée rouge. Plus de 81000 sont donc toujours manquants...
Par ordre secret n° 0011365 du 25 octobre 1940, fut dressée une liste des primes signée par Lavrenti Beria en personne, qui accordait à 44 fonctionnaires du NKVD une prime mensuelle de 800 roubles chacun "pour avoir exécuté de manière efficace des devoirs spéciaux"
Alexandra Viatteau
Déclaration des droits de l'Homme
Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789
Les Représentants du Peuple Français, constitués en Assemblée Nationale, considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'Homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des Gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une Déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l'Homme, afin que cette Déclaration, constamment présente à tous les Membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs ; afin que leurs actes du pouvoir législatif, et ceux du pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés; afin que les réclamations des citoyens, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous.
En conséquence, l'Assemblée Nationale reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l'Etre suprême, les droits suivants de l'Homme et du Citoyen.
Art. 1er.
Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.
Art. 2.
Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression.
Art. 3.
Le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément.
Art. 4.
La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi.
Art. 5.
La Loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. Tout ce qui n'est pas défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas.
Art. 6.
La Loi est l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.
Art. 7.
Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la Loi, et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi doit obéir à l'instant : il se rend coupable par la résistance.
Art. 8.
La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée.
Art. 9.
Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi.
Art. 10.
Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi.
Art. 11.
La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre à l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi.
Art. 12.
La garantie des droits de l'Homme et du Citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée.
Art. 13.
Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.
Art. 14.
Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée.
Art. 15.
La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration.
Art. 16.
Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution.
Art. 17.
La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.
Un jour comptant fleurette..
Un jour, contant fleurette à une aveugle,
Dans les champs je lui dis que je l’aimais.
Elle répondit que son amant
Me disait affreux comme la mort.
Alors j’allai trouver le gaillard malintentionné.
Il me dit : “Mieux vaut ne pas fleureter
Avec une fille aux yeux vides,
Les penchants inconvenants mènent à la mort.”
Je m’en moquais : elle ne voyait rien !
Je la pris dans mes bras.
Le grand gaillard me traita de scélérat
Et m’arracha les yeux.
Maintenant je suis aveugle, affreux et mort.
Dans les champs je lui dis que je l’aimais.
Elle répondit que son amant
Me disait affreux comme la mort.
Alors j’allai trouver le gaillard malintentionné.
Il me dit : “Mieux vaut ne pas fleureter
Avec une fille aux yeux vides,
Les penchants inconvenants mènent à la mort.”
Je m’en moquais : elle ne voyait rien !
Je la pris dans mes bras.
Le grand gaillard me traita de scélérat
Et m’arracha les yeux.
Maintenant je suis aveugle, affreux et mort.
Lautréamont-Les chants de Maldoror-Chant 1er
On doit laisser pousser ses ongles pendant quinze jours. Oh ! comme il est doux d’arracher brutalement de son lit un enfant qui n’a rien encore sur la lèvre supérieure, et, avec les yeux très-ouverts, de faire semblant de passer suavement la main sur son front, en inclinant en arrière ses beaux cheveux ! Puis, tout à coup, au moment où il s’y attend le moins, d’enfoncer les ongles longs dans sa poitrine molle, de façon qu’il ne meure pas ; car, s’il mourait, on n’aurait pas plus tard l’aspect de ses misères. Ensuite, on boit le sang en léchant les blessures ; et, pendant ce temps, qui devrait durer autant que l’éternité dure, l’enfant pleure Rien n’est si bon que son sang, extrait comme je viens de le dire, et tout chaud encore, si ce ne sont ses larmes, amères comme le sel. Homme, n’as-tu jamais goûté de ton sang, quand par hasard tu t’es coupé le doigt ? Comme il est bon, n’est-ce pas ; car, il n’a aucun goût. En outre, ne te souviens-tu pas d’avoir un jour, dans tes réflexions lugubres, porté la main, creusée au fond, sur ta figure maladive mouillée par ce qui tombait des yeux ; laquelle main ensuite se dirigeait fatalement vers la bouche, qui puisait à longs traits, dans cette coupe, tremblante comme les dents de l’élève qui regarde obliquement celui qui est né pour l’oppresser, les larmes ? Comme elles sont bonnes, ,’est-ce pas ; car, elles ont le goût du vinaigre. On dirait les larmes de celle qui aime le plus ; mais, les larmes de l’enfant sont meilleures au palais. Lui, ne trahit pas, ne connaissant pas encore le mal ; celle qui aime le plus trahit tôt ou tard… je le devine par analogie, quoique j’ignore ce que c’est que l’amitié, que l’amour (il est probable que je ne les accepterai jamais ; du moins, de la part de la race humaine). Donc, puisque ton sang et tes larmes ne te dégoûtent pas, nourris-toi, nourris-toi avec confiance des larmes et du sang de l’adolescent. Bande-lui les yeux, pendant que tu déchireras ses chairs palpitantes ; et, après avoir entendu de longues heures ses cris sublimes, semblables aux râles perçants que poussent dans une bataille les gosiers des blessés agonisants, alors, t’ayant écarté comme une avalanche, tu te précipiteras de la chambre voisine, et tu feras semblant d’arriver à son secours. Tu lui délieras les mains, aux nerfs et aux veines gonflées, tu rendras la vue à ses yeux égarés, en te remettant à lécher ses larmes et son sang. Comme alors le repentir est vrai ! L’étincelle divin e qui est en nous, et paraît si rarement, se montre ; trop tard ! Comme le cœur dérobe de pouvoir consoler l’innocent à qui l’on a fait du mal : « Adolescent, qui venez de souffrir des douleurs cruelles, qui donc a pu commettre sur vous un crime que je ne sais de quel nom qualifier ! Malheureux que vous êtes ! Comme vous devez souffrir ! Et si votre mère savait cela, elle ne serait pas plus près de la mort, si abhorrée par les coupables, que je ne le suis maintenant. Hélas ! qu’est-ce donc que le bien et le mal ! Est-ce une même chose par laquelle nous témoignons avec rage notre impuissance, et la passion d’atteindre à l’infini par les moyens même les plus insensés ? Ou bien, sont-ce deux choses différentes ? Oui… que ce soit plutôt une même chose… car, sinon, que deviendrai-je au jour du jugement ! Adolescent, pardonne-moi ; c’est celui qui est devant ta figure noble et sacrée, qui a brisé tes os et déchiré les chairs qui pendent à différents endroits de ton corps. Est-ce un délire de ma raison malade, est-ce un instinct secret qui ne dépend pas de mes raisonnements, pareil à celui de l’aigle déchirant sa proie, qui m’a poussé à commettre ce crime ; et pourtant, autant que ma victime, je souffrais ! Adolescent, pardonne-moi. Une fois sortis de cette vie passagère, je veux que nous soyons entrelacés pendant l’éternité ; ne former qu’un seul être, ma bouche collée à ta bouche. Même, de cette manière, ma punition ne sera pas complète. Alors, tu me déchireras, sans jamais t’arrêter, avec les dents et les ongles à la fois. Je parerai mon corps de guirlandes embaumées, pour cet holocauste expiatoire ; et nous souffrirons tous les deux, moi d’être déchiré, toi, de me déchirer… ma bouche collée à ta bouche. O adolescent, aux cheveux blonds, aux yeux si doux, feras-tu maintenant ce que je te conseille ? Malgré toi, je veux que tu le fasses, et tu rendras heureuse ma conscience. » Après avoir parlé ainsi, en même temps tu auras fait le mal à un être humain, et tu seras aimé du même être : c’est le bonheur le plus grand que l’on puisse concevoir. Plus tard, tu pourras le mettre à l’hôpital ; car, le perclus ne pourra pas gagner sa vie. On t’appellera bon, et les couronnes de laurier et les médailles d’or cacheront tes pieds nus, épars sur la grande tombe, à la figure vieille. O toi, dont je ne veux pas écrire le nom sur cette page qui consacre la sainteté du crime, je sais que ton pardon fut immense comme l’univers. Mais, moi, j’existe encore !
Chaplin-Le dictateur-Extraits
Comme vous voudrez. Mais rappelez-vous ce que je vais vous dire : Votre action échouera immanquablement parce qu'elle est basée sur la persécution bête et sans raison de tout un peuple. Votre politique est pire qu'un simple crime, c'est une tragique bévue.
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la fin :
Je suis désolé, mais je ne veux pas être empereur. Ce n’est pas mon affaire. Je ne veux ni conquérir ni diriger personne. Je voudrais aider tout le monde dans la mesure du possible : juifs, chrétiens, païens, blancs et noirs. Nous voudrions tous nous aider si nous le pouvions ; les êtres humains sont ainsi faits. Nous voulons donner le bonheur à notre prochain, pas lui donner le malheur. Nous ne voulons ni haïr ni humilier personne.
Dans ce monde chacun de nous a sa place et notre terre est bien assez riche. Elle peut nourrir tous les êtres humains. Nous pouvons tous avoir une vie belle et libre, mais nous l’avons oublié.
L’envie a empoisonné l’esprit des hommes, a barricadé le monde avec la haine, nous a fait sombrer dans la misère et les effusions de sang.
Nous avons développé la vitesse pour nous enfermer en nous-mêmes. Les machines qui nous apportent l’abondance nous laissent dans l’insatisfaction. Notre savoir nous a fait devenir cyniques. Nous sommes inhumains à force d’intelligence.
Nous ne ressentons pas assez et nous pensons beaucoup trop. Nous sommes trop mécanisés et nous manquons d’humanité. Nous sommes trop cultivés et nous manquons de tendresse et de gentillesse. Sans ces qualités humaines la vie n’est plus que violence et tout est perdu.
Les avions, la radio, nous ont rapprochés les uns des autres. Ces inventions ne trouveront leur vrai sens que dans la bonté de l’être humain, que dans la fraternité, l’unité et l’unité de tous les hommes.
En ce moment même ma voix atteint des millions de gens à travers le monde ; des millions d’hommes, de femmes et d’enfants désespérés, victimes d’un système qui torture les faibles et emprisonne les innocents. Je dis à tous ceux qui m’entendent : ne désespérez pas. le malheur qui est sur nous n’est que le produit éphémère de l’avidité, de l’amertume de ceux qui ont peur des progrès qu’accomplie l’humanité.
Mais la haine finira par disparaître et les dictateurs mourront. Et le pouvoir qu’ils avaient pris au peuple va retourner au peuple. Et tant que les hommes mourront, la liberté ne pourra pas périr.
Soldats, ne vous donnez pas à ces brutes ; à une minorité qui vous méprise et qui fait de vous des esclaves en régimant toute votre vie ; qui vous dit ce qu’il faut faire et ce qu’il faut penser ; qui vous dirigent, vous manœuvrent, se sert de vous comme chair à canon, et qui vous traite comme du bétail. Ne donnez pas votre vie à ces être inhumains. Ces hommes-machine avec une machine à la place de la tête et une machine dans le cœur. Vous n’êtes pas des machines. Vous n’êtes pas des esclaves. Vous êtes des hommes. Des hommes avec tout l’amour du monde dans le cœur. Vous n’avez pas de haine sinon pour ce qui est inhumain : ce qui n’est pas fait d’amour.
Soldats, ne vous battez pas pour l’esclavage mais pour la liberté.
Il est écrit dans l’évangile selon Saint Luc : « Le royaume de dieu est dans l’être humain ». Pas dans un seul humain, ni dans un groupe d’humain, mais dans tous les êtres humains.
Et vous, vous le peuple, qui avez le pouvoir, le pouvoir de créer les machines, le pouvoir de créer le bonheur, vous le peuple en avez le pouvoir. Le pouvoir de rendre la vie belle et libre. Le pouvoir de faire de cette vie une merveilleuse aventure. Alors, au nom même de la démocratie : utilisons ce pouvoir, il faut tous nous unir.
Il faut nous battre pour un monde nouveau, décent et humain, qui donnera à chacun l’occasion de travailler, qui apportera un avenir à la jeunesse et à la vieillesse la sécurité.
Ces brutes vous ont promis toutes ces choses pour que vous leur donniez le pouvoir. Ils mentaient. Ils n’ont pas tenus leurs merveilleuses promesses. Jamais ils ne le feront.
Les dictateurs s’affranchissent en prenant le pouvoir mais ils font un esclave du peuple.
Alors il faut nous battre pour accomplir toutes leurs promesses. Il faut nous battre pour libérer le monde, pour renverser les frontières et les barrières raciales, pour en finir avec l’avidité, avec la haine et l’intolérance.
Il faut nous battre pour construire un monde de raison, un monde où la science et le progrès mèneront tous les hommes vers le bonheur.
Soldats, au nom de la démocratie : unissons-nous tous.
Anna, est-ce que tu m’entends ? Où que tu sois, regardes vers le ciel Anna : les nuages s’éloignent, le soleil recommence à briller. Nous sortons des ténèbres, nous allons vers la lumière. Nous entrons dans un monde nouveau fait d’humanité, où les hommes surmonteront leur haine, leur avidité et leur brutalité.
Regardes vers le ciel Anna : l’âme humaine a retrouvé ses ailes. Elle prend son envol à travers l’arc-en-ciel, vers la lumière de l’espoir, vers l’avenir.
L’avenir glorieux qui nous appartient, à toi, à moi, à nous tous.
Regardes vers le ciel Anna, regardes.
Arrabal-A travers sa peau de panthère
A travers sa peau de panthère je voyais ses genoux blancs, ses ongles laqués et sa chevelure blonde. Sous ses crocs de fauve je voyais aussi ses lèvres jointes et maquillées.
Elle rôdait autour de moi, elle apparaissait et disparaissait et parfois semblait danser. Je crus l’entendre dire : « Je suis l’Immaculée Conception ».
Puis d’autres panthères passèrent, montées par des hommes nus qui riaient en me voyant. Je compris que je devais me déshabiller et je le fis. Aussitôt elle vint se placer tout près de moi, et au moment où j’allais monter sur elle, elle me jeta à terre et, avec ses ongles de panthère, me déchira la poitrine.
Baez-Gracias a la vida
Gracias a la vida que me ha dado tanto,
Me dió dos luceros, que cuando los abro,
Perfecto distingo lo negro del blanco,
Y en el alto cielo su fondo estrellado,
Y en las multitudes el hombre que yo amo.
Gracias a la vida que me ha dado tanto,
Me ha dado el sonido y el abecedario,
Con él las palabras que pienso y declaro,
“Madre,” “amigo”,”hermano,” y luz alumbrando,
La ruta del alma de el que estoy amando.
Gracias a la vida que me ha dado tanto,
Me ha dado el oído que en todo su ancho,
Graba noche y día grillos y canarios,
Martillos, turbinas, ladrillos, chubascos,
Y la voz tan tierna de mi buen amado.
Gracias a la vida que me ha dado tanto,
Me ha dado la marcha de mis pies cansados,
Con ellos anduve ciudades y charcos,
Playas y desiertos, montañas y llanos,
Y la casa tuya, tu calle y tu patio.
Gracias a la vida que me ha dado tanto.
Me ha dado la risa, me ha dado el llanto.
Así yo distingo dicha de quebranto,
Los dos materiales que forman mi canto,
Y el canto de todos que es mi propio canto.
Gracias a la vida, que me ha dado tanto.
——
Thanks to life which has given me so much,
It gave me two eyes that when I open them,
I can distinguish perfectly black from white,
And in the high heaven its starry background,
And in the multitude the man I love.
Thanks to life which has given me so much,
It’s given me sound and the alphabet.
And with it the words that I think and declare :
“mother,” “friend,” “brother”, and burning light,
The route of the soul of the one I am loving.
Thanks to life which has given me so much,
It’s given me sound that in all its magnitude,
Records night and day crickets and canaries,
Hammers, turbines, dogs’ barks, storms,
And the voice so tender of my good beloved.
Thanks to life which has given me so much,
It’s given me the steps of my tired feet,
With them I walked through cities and puddles,
Beaches and deserts, mountains and plains,
And your house, your street and your patio.
Thanks to life which has given me so much,
It’s given me laughter, it’s given me tears,
Thereby I distinguish good fortune from ruin,
The two materials that make up my song,
And the song of all of you that is my own song.
Thanks to life which has given me so much.
Me dió dos luceros, que cuando los abro,
Perfecto distingo lo negro del blanco,
Y en el alto cielo su fondo estrellado,
Y en las multitudes el hombre que yo amo.
Gracias a la vida que me ha dado tanto,
Me ha dado el sonido y el abecedario,
Con él las palabras que pienso y declaro,
“Madre,” “amigo”,”hermano,” y luz alumbrando,
La ruta del alma de el que estoy amando.
Gracias a la vida que me ha dado tanto,
Me ha dado el oído que en todo su ancho,
Graba noche y día grillos y canarios,
Martillos, turbinas, ladrillos, chubascos,
Y la voz tan tierna de mi buen amado.
Gracias a la vida que me ha dado tanto,
Me ha dado la marcha de mis pies cansados,
Con ellos anduve ciudades y charcos,
Playas y desiertos, montañas y llanos,
Y la casa tuya, tu calle y tu patio.
Gracias a la vida que me ha dado tanto.
Me ha dado la risa, me ha dado el llanto.
Así yo distingo dicha de quebranto,
Los dos materiales que forman mi canto,
Y el canto de todos que es mi propio canto.
Gracias a la vida, que me ha dado tanto.
——
Thanks to life which has given me so much,
It gave me two eyes that when I open them,
I can distinguish perfectly black from white,
And in the high heaven its starry background,
And in the multitude the man I love.
Thanks to life which has given me so much,
It’s given me sound and the alphabet.
And with it the words that I think and declare :
“mother,” “friend,” “brother”, and burning light,
The route of the soul of the one I am loving.
Thanks to life which has given me so much,
It’s given me sound that in all its magnitude,
Records night and day crickets and canaries,
Hammers, turbines, dogs’ barks, storms,
And the voice so tender of my good beloved.
Thanks to life which has given me so much,
It’s given me the steps of my tired feet,
With them I walked through cities and puddles,
Beaches and deserts, mountains and plains,
And your house, your street and your patio.
Thanks to life which has given me so much,
It’s given me laughter, it’s given me tears,
Thereby I distinguish good fortune from ruin,
The two materials that make up my song,
And the song of all of you that is my own song.
Thanks to life which has given me so much.
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